Burkina Faso : la prison ou le front, les nouvelles destinations des voix discordantes

Rasmane Zinaba et Bassirou Badjo, deux membres du Balai citoyen, un mouvement réputé pour sa liberté de ton envers les pouvoirs en place, ont été envoyés en prison autant que d’autres voix discordantes de la classe politique ou de la société civile.

Le premier, chargé de l’organisation au sein du mouvement, a été enlevé mardi 20 février à son domicile de Ouagadougou par des hommes « en civil et armés », puis emmené « dans un lieu jusque-là inconnu », a indiqué dans un communiqué le Balai citoyen, qui fut en 2014 l’un des fers de lance de l’insurrection populaire ayant mis un terme aux trente années de pouvoir de Blaise Compaoré.

Le lendemain après-midi, Bassirou Badjo, simple militant du mouvement, employé à la Direction générale de la solidarité nationale et de l’assistance humanitaire, a à son tour été « enlevé sur son lieu de travail » par « des individus se présentant comme des agents de la sûreté de l’Etat [les services secrets] », a précisé le Balai citoyen dans un second communiqué.

Tous deux figuraient sur une liste de personnes à enrôler de force dressée par la junte début novembre 2023. Le 6 décembre, le tribunal administratif de Ouagadougou, qu’ils avaient saisi pour statuer sur la légalité de leur réquisition par le régime, leur avait donné gain de cause, estimant que celle-ci, rendue possible par le décret portant mobilisation générale pris sept mois plus tôt par le président de transition, Ibrahim Traoré, était illégale. Le juge avait ordonné que soit suspendu leur recrutement de force dans les rangs des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), des supplétifs censés épauler l’armée dans sa lutte contre les groupes djihadistes qui gangrènent le pays depuis 2015.

L’ancien ministre des affaires étrangères, Ablassé Ouedraogo, et le lauréat 2022 du prix Martin-Ennals pour les défenseurs des droits humains, Daouda Diallo, étaient portés disparus depuis leur enlèvement, en décembre. Dimanche, ces deux personnalités, rares voix à encore oser critiquer publiquement la gestion sécuritaire et répressive du capitaine Traoré, ont été présentées en treillis, kalachnikov à la main, sur une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux.

Koné ERIC

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