BURUNDI : Dilemme autour des enfants dits de la rue, qui s’en préoccupe ?
Plus de 7000 enfants vivent dans la rue à la mendicité au Burundi, selon une enquête effectuée par la Coordination des directions provinciales. La ville de Bujumbura qui est la capitale économique, compte, elle seule, 5000 enfants de la rue. Malgré la décision du gouvernement de les chasser, ils sont revenus au galop et errent toujours dans les rues de Bujumbura.
« Où voulez-vous qu’on aille ? Moi, mon père n’est plus, et ma mère s’est remariée dans une autre famille. Et depuis lors, je suis descendu à Bujumbura, et je n’ai pas eu du travail. Et pour survivre, j’ai commencé à mendier. Je n’ai pas où aller », confie Bizoza, un jeune enfant de la rue croisé non loin de l’église catholique Saint-Michel, en plein centre de Bujumbura.
Après avoir été arrêté lors des rafles des mendiants et conduit dans sa province natale au nord du pays, il est de retour à Bujumbura. Aujourd’hui, il surveille les policiers pour ne pas se retrouver entre leurs mains
Orphelin, il dit n’avoir aucun autre moyen de survivre : « Après la mort de mes parents, mes oncles ont vendu nos biens. Quand j’ai tenté de porter plainte, j’ai subi des menaces de mort. Et j’ai fui ma région vers Bujumbura. Je ne pouvais plus continuer de vivre là-bas ».
Il reconnaît que la mendicité est risquée. « Il y a des risques mais on n’a pas vraiment le choix. Si je parviens à avoir une autre occupation, ça me réjouirait », avoue-t-il, notant que dans la rue, ils sont exposés, entre autres, aux violences physiques et à la consommation des drogues.
Parmi les enfants de la rue, certains vivent avec un handicap physique. Ce qui attire souvent la compassion des passants. « Comment puis-je vivre sans mendier ? Comment pourrai-je travailler dans cet état-là ? Je vis grâce aux esprits charitables », confie Edison, un enfant de la rue, croisé sur l’avenue de la Mission. Il n’a que 13 ans.
« Je n’ai pas de famille qui pourrait me prendre en charge », avoue-t-il. Et pour arriver au centre-ville, c’est son grand frère de 16 ans, lui aussi enfant de la rue, qui le transporte sur son dos.
« Ils menacent de nous renvoyer dans nos provinces d’origine. Mais, nous, nous sommes des natifs de Bujumbura. Où est-ce qu’ils vont nous envoyer ? Qu’ils nous trouvent d’autres moyens de survie. Là, ça pourrait aller », lance-t-il
De son côté, Dr Nicolas Hajayandi, sociologue, indique que plusieurs causes sont derrière ce phénomène. Il évoque, entre autres, les enfants orphelins à cause des crises politiques qui se sont abattues sur le pays ou à cause du VIH/Sida.
» Certains enfants ne trouvent pas des familles pour les prendre en charge après la mort de leurs parents. Et là, ils se retrouvent dans la rue en train de mendier », analyse-t-il.
Dr Hajayandi note qu’il y a aussi des enfants vivant dans la rue parce qu’ils y sont nés. » Ceux-là ne connaissent que la rue », regrette-t-il.
Pour réussir, ce sociologue conseille de sensibiliser tous les acteurs impliqués dans ce domaine.
Pour lui, chaque fois qu’on va utiliser la force pour le retrait de ces enfants, la procédure sera toujours vouée à l’échec. « Il faut réinsérer par le travail, par l’encadrement, par le contrôle et le suivi de la part des acteurs concernés », suggère-t-il.
Pour rappel, le 7 juillet 2022, plus de 200 adultes mendiants et 90 enfants de la rue ont été arrêtés dans les rues de Bujumbura, après la fin de l’ultimatum du gouvernement, donné mi-juin, de quitter les lieux volontairement.
Par Hadwig Light
Source : Anadolu Ajansi